Texte en vigueur

Nouvelle loi

 

Loi générale sur l’égalité et la lutte contre les discriminations
(LED)

A 2 90

du 23 mars 2023

(Entrée en vigueur : 1er juillet 2023)

 

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genève,

vu la Déclaration universelle des droits de l’homme, du 10 décembre 1948;

vu la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, du 4 novembre 1950;

vu le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, du 16 décembre 1966;

vu le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, du 16 décembre 1966;

vu les articles 8, 35 et 36 de la Constitution fédérale, du 18 avril 1999;

vu les articles 15, 41 et 43 de la constitution de la République et canton de Genève, du 14 octobre 2012,

décrète ce qui suit :

 

Chapitre I        Buts et principes

 

Art. 1        Buts

1 La présente loi a pour buts la mise en œuvre de l’égalité en droit, la promotion de l’égalité en fait, et la lutte contre les violences et les discriminations directes ou indirectes fondées sur une caractéristique personnelle.

2 Par caractéristique personnelle au sens de la présente loi, on entend notamment l’origine, l’âge, le sexe, l’orientation affective ou sexuelle, l’identité de genre, l’expression de genre, l’intersexuation, les incapacités, les particularités physiques, la situation sociale ou familiale, les convictions religieuses ou politiques.

3 La lutte contre les violences et les discriminations vise à les prévenir, à les faire cesser et à remédier à leurs conséquences.

 

Art. 2        Egalité

Toutes les personnes sont égales en droit.

 

Art. 3        Interdiction des violences et des discriminations

Toutes les formes de violences et de discriminations directes, indirectes ou multiples fondées sur une caractéristique personnelle sont interdites.

 

Art. 4        Besoins spécifiques

L’Etat tient compte des besoins spécifiques liés aux caractéristiques personnelles.

 

Chapitre II       Mesures

 

Art. 5        Politiques publiques

L’Etat intègre la promotion de l’égalité au sens de l’article 2 ainsi que la prévention et la lutte contre les violences et les discriminations au sens de l’article 3 à l’ensemble de ses politiques publiques.

 

Art. 6        Prise en charge

L’Etat veille à ce que les personnes victimes de violences ou de discriminations au sens de l’article 3 bénéficient d’une prise en charge spécialisée, notamment en matière de conseils, de soutien, d’écoute ou de défense juridique.

 

Art. 7        Communication

1 Dans sa communication interne et externe, dans la rédaction législative et administrative ainsi que dans les relations avec son personnel et la population, l’Etat utilise une communication accessible et ne reproduisant pas de stéréotypes fondés sur des caractéristiques personnelles.

2 Il forme son personnel à cet effet.

 

Art. 8        Statistiques

1 Afin d’effectuer le suivi de la mise en œuvre de la présente loi, l’Etat établit des statistiques sur l’égalité, les violences et les discriminations au sens de l’article 3.

2 L’Etat développe des indicateurs basés sur les droits fondamentaux qui permettent l’élaboration de statistiques renseignant sur les conditions de vie des membres des groupes discriminés concernés.

3 Les statistiques en matière pénale intègrent le caractère discriminatoire au sens de la présente loi des infractions traitées.

4 Ces statistiques sont publiées.

 

Art. 9        Information et sensibilisation

1 L’Etat informe sur les connaissances relatives à l’égalité ainsi qu’aux violences, discriminations, préjugés et stéréotypes fondés sur des caractéristiques personnelles.

2 Il mène des campagnes de sensibilisation et de prévention sur ces questions.

 

Art. 10      Formation

Les questions d’égalité et de lutte contre les violences et les discriminations au sens de la présente loi sont intégrées aux formations dont l’Etat a la responsabilité ou qui concernent son personnel.

 

Art. 11      Action sociale

L’Etat favorise une approche intersectionnelle et intègre la prévention des violences et des discriminations au sens de l’article 3 dans ses actions visant à prévenir la pauvreté et l’exclusion et à favoriser l’autonomie et l’intégration sociale et professionnelle des personnes en difficulté.

 

Art. 12      Atteinte à la personnalité

L’Etat veille à ce que les atteintes à la personnalité, constitutives de violences ou de discriminations au sens de l’article 3, soient effectivement poursuivies conformément aux dispositions pertinentes du code pénal suisse, du 21 décembre 1937.

 

Art. 13      Atteintes à la personnalité dans l’espace public

1 L’Etat veille à ce que soient effectivement poursuivies les atteintes à la personnalité dans l’espace public, conformément, notamment, aux articles 177, 180, 181, 198 et 261bis du code pénal suisse, du 21 décembre 1937.

2 Il mène des campagnes d’information et de prévention contre ces atteintes.

3 Il forme adéquatement les personnes chargées d’intervenir pour prévenir ou faire cesser ces atteintes.

 

Art. 14      Procédés de réclame

Les procédés de réclame perceptibles depuis le domaine public faisant appel à des représentations discriminatoires fondées sur des caractéristiques personnelles au sens de la présente loi sont interdits conformément à l’article 9, alinéa 3, de la loi sur les procédés de réclame, du 9 juin 2000.

 

Chapitre III      Application au secteur privé

 

Art. 15      Principe

1 L’Etat incite les personnes privées à respecter les principes et exigences posées par la présente loi.

2 Son action à cet égard est notamment dirigée vers les entreprises, ainsi que les institutions actives en matière culturelle, sociale, sportive et de formation.

3 A cette fin, l’Etat peut notamment :

a)  mener des campagnes de sensibilisation;

b)  conclure des partenariats avec des organisations, entreprises ou autres institutions privées;

c)  encourager des formations du personnel et des labels.

4 L’action incitative de l’Etat vise en particulier à amener les entreprises et institutions privées :

a)  à veiller à l’absence de violences et de discriminations au sens de l’article 3;

b)  à sensibiliser leur personnel au respect des principes posés par la présente loi, aux préjugés, aux discriminations directes ou indirectes, ainsi qu’aux besoins spécifiques fondés sur des caractéristiques personnelles;

c)  à pratiquer une communication accessible et ne reproduisant pas de stéréotypes fondés sur des caractéristiques personnelles.

 

Art. 16      Marchés publics

1 Sous réserve des dispositions du droit international, fédéral et intercantonal, l’autorité adjudicatrice peut, dans les critères d’adjudication d’un marché public, tenir compte du respect par les entreprises soumissionnaires des principes posés par la présente loi.

2 Le Conseil d’Etat règle les modalités d’application du présent article, après consultation des partenaires sociaux. En principe, une déclaration de l’entreprise soumissionnaire suffit.

 

Art. 17      Indemnités et aides financières

L’octroi d’indemnités et d’aides financières au sens de la loi sur les indemnités et les aides financières, du 15 décembre 2005, est subordonné au respect par l’entité bénéficiaire des principes posés par la présente loi.

 

Art. 18      Délégation de tâches publiques

Quelle que soit sa forme juridique, la délégation de tâches publiques est subordonnée au respect par l’entité délégataire des principes posés par la présente loi.

 

Chapitre IV      Mise en œuvre

 

Art. 19      Tâches et obligations de l’Etat

1 Conformément à l’article 148, alinéa 1, de la constitution de la République et canton de Genève, du 14 octobre 2012, les tâches et obligations prévues aux chapitres I à III de la présente loi sont assumées par le canton, les communes et les institutions de droit public.

2 Tous les organes et autorités de l’Etat appliquent, dans l’exercice de leurs compétences, les principes et exigences posés par la présente loi et mettent en œuvre les mesures qu’elle prescrit.

3 Ils informent les services visés à l’article 23 de leurs actions en la matière.

 

Art. 20      Législation sectorielle

1 Le canton précise et complète les principes et les mesures prévues par la présente loi dans des lois sectorielles. Celles-ci tiennent compte des différents types de caractéristiques personnelles susceptibles d’entraîner des discriminations.

2 Le canton édicte des lois sectorielles pour lutter contre les discriminations fondées par exemple sur :

a)  le sexe, l’orientation affective et sexuelle, l’identité de genre, l’expression de genre ou l’intersexuation;

b)  l’origine;

c)  les incapacités;

d)  l’âge.

 

Art. 21      Plans d’action cantonaux

1 Au début de chaque législature et pour la durée de celle-ci, le Conseil d’Etat adopte des plans d’action cantonaux sectoriels en matière d’égalité et de lutte contre les discriminations, qui sont soumis au Grand Conseil sous forme de rapport.

2 Les plans d’action cantonaux prévoient notamment :

a)  une stratégie cohérente et des mesures en vue de la réalisation des buts de la présente loi et, le cas échéant, de la loi sectorielle pertinente;

b)  un travail de réseau avec les différents acteurs étatiques et non étatiques concernés, notamment les communes et les associations;

c)  les ressources nécessaires à la mise en œuvre des actions prévues, y compris les éventuels soutiens financiers aux associations et institutions dont la contribution est requise.

 

Art. 22      Evaluation et adaptation

1 Les plans d’action cantonaux comportent des indicateurs quantitatifs et qualitatifs en vue d’évaluer l’efficacité de la stratégie et des mesures qu’ils prévoient.

2 En fin de législature, le Conseil d’Etat évalue les plans d’action cantonaux.

3 Les résultats de l’évaluation sont intégrés aux plans d’action cantonaux visés à l’article 21, dans une perspective d’amélioration et d’adaptation aux changements contextuels.

 

Art. 23      Services spécialisés

1 Sous réserve des dispositions spéciales des lois sectorielles, le Conseil d’Etat désigne les services compétents pour l’application de la présente loi.

2 Ces services sont chargés d’assurer la transversalité et la cohérence de l’action de l’Etat en matière de promotion de l’égalité, de lutte contre les discriminations et de prévention des violences, notamment en consultant les départements concernés.

 

Art. 24      Dispositions d’application

Le Conseil d’Etat édicte les dispositions d’application de la présente loi.

 

Art. 25      Entrée en vigueur

Le Conseil d’Etat fixe l’entrée en vigueur de la présente loi.

 

RSG                     Intitulé

Date d'adoption

Entrée en vigueur

A 2 90     L générale sur l’égalité et la lutte contre les discriminations

23.03.2023

01.07.2023

Modification :  néant